Face à la banalisation du port du couteau chez les adolescents, la Préfecture de police de Paris a organisé, le 16 juin 2025, une grande journée de citoyenneté dédiée à la sensibilisation de la jeunesse à ses dangers, dans l’amphithéâtre du Groupe INTÉRIALE. L’occasion également de les initier à la chaîne pénale lors de la reconstitution d’un procès fictif.
80 collégiens de la région Île-de France ont ainsi participé à cette journée alliant sensibilisation, immersion judiciaire et dialogue institutionnel. Un moment fort durant lequel ils ont échangé avec des professionnels du continuum de sécurité et de justice, policiers et magistrats, ainsi que des médecins, psychologues et représentants de l’éducation nationale.
Éduquer par le réel
Un premier temps d’échange, animé par la commissaire Salima Goujdad, a permis un dialogue direct entre jeunes et intervenants de la chaîne pénale et éducative.
Le commandant Sandrine Lejeune, spécialisée dans la lutte contre les bandes, a illustré la banalisation du port d’arme chez les mineurs, amplifiée par les réseaux sociaux. Lisa-Lou Wipf, vice-procureure au parquet des mineurs, a insisté sur l’effet de bascule et évoqué le poids de la sanction et les peines encourues. Le Dr Charlotte Gorgiard, cheffe de l’UMJ (unité médico-judiciaire) de l’Hôtel-Dieu, a marqué les esprits par son interaction directe avec le public. Elle a démontré comment une lame de quelques centimètres peut sectionner une artère ou toucher un organe vital. Axelle Garnier de Saint Sauveur, psychologue, a exploré les motivations profondes, la peur et l’impact des images. Elle a insisté sur le poids psychologique que peut entrainer la mort, ou le fait de blesser quelqu’un avec une arme blanche. Elle a évoqué les familles, brisées pendant longtemps, parfois souffrant en silence.
Les jeunes ont exprimé leurs inquiétudes sur « la nécessité de se défendre », certains évoquant la pression du groupe. Les représentants des forces de l’ordre leur ont rappelé que le port d’arme constitue un délit sans avoir à s’en servir.
Reconstituer un procès pénal
Organisé par l’association « Jeune & Engagé », l’atelier a permis aux élèves de s’immerger dans une reconstitution de procès pénal : un adolescent accusé d’avoir blessé un autre élève avec une arme blanche.
Les rôles (avocats, juge, jurés, victime, prévenu…) ont été choisis par les jeunes, qui ont fait preuve de force de conviction pour dépasser leur position habituelle et entrer dans la peau de figures judiciaires ou de victimes et agresseurs.
Un moment essentiel pour comprendre leurs droits et responsabilités ainsi que le fonctionnement de la justice. D’ailleurs, les enseignants accompagnateurs ont noté un engagement exceptionnel de certains élèves d’ordinaire en retrait et souligné l’impact pédagogique de l’exercice sur des jeunes souvent éloignés de la parole publique et des enjeux judiciaires.
Liens police-jeunesse : des actions et un message plein d’optimisme
Une dernière table ronde a réuni Salima Goujdad, en tant qu’animatrice, Mohamed Douhane, chef de projet sécurité au sein de l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT), et Laurent Michel, directeur des affaires publiques d’INTÉRIALE et également directeur du Continuum Lab[1].
Mohamed Douhane a insisté sur les actions de l’ANCT pour favoriser, sur tous les territoires, le dialogue, la médiation et la prévention.
Une des missions du Continuum Lab est de renforcer le lien entre la jeunesse et les institutions régaliennes de sécurité et de justice, en sensibilisant et dialoguant avec celles et ceux qui font la société d’aujourd’hui et de demain.
À ce titre, Laurent Michel est notamment revenu sur les actions concrètes du think tank et l’enquête Jeunesse de celui-ci sur les perceptions des 16-24 ans sur les instituions sécurité/justice, conduite en 2024 sous l’égide d’Anne Muxel, directrice déléguée du CEVIPOF (Sciences Po Paris) et directrice de recherche émérite au CNRS :
- 65% des jeunes ont confiance dans la police,
- 87% d’entre eux pensent que l’on peut améliorer les relations entre les jeunes et la police.
Une clôture institutionnelle
Julie Benetti, rectrice de la région académique d’Île-de-France, Laure Beccuau, procureure de la République de Paris et Laurent Nuñez, préfet de police, étaient présents et ont dialogué avec des élèves attentifs, conscients de la nécessité d’être informés.
« Le port d’un couteau n’est pas anodin. C’est un danger réel, pour soi, pour les autres, et aux conséquences souvent irréversibles. Cette action s’inscrit dans un engagement plus large : renforcer encore le lien entre jeunesse et forces de sécurité, refuser la violence, faire grandir les citoyens de demain. » – Laurent Nunez, préfet de police
La conclusion, portée par le préfet de police de Paris, la procureure de la République et la rectrice d’Académie, a été claire et commune :
« Renoncer à la violence, c’est choisir de maîtriser son destin ».
La remise de certificats et d’attestations de participation à la journée a eu à la fois une portée symbolique, en valorisant la participation citoyenne des jeunes, et une utilité concrète en permettant de valider des compétences dans les futurs dossiers scolaires des jeunes, sur Parcoursup par exemple.
Cet événement, conçu et piloté par Salima Goujdad, commissaire de police, sous l’impulsion de ses chefs de l’état-major de la DSPAP (Direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne), avec le soutien des équipes de la prévention et des partenariats et de la coordination judiciaire, fait partie de la stratégie de sensibilisation de la jeunesse issu du plan de prévention et de lutte contre le port et l’usage des armes blanches par des mineurs initié début 2025 par la Ville de Paris, la Préfecture de police, le Parquet de Paris, le Rectorat de Paris et la Direction territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse.
[1] Think tank lancé à l’initiative d’INTÉRIALE en 2021, qui a pour objectif de réunir dans un espace de dialogue et de réflexion tous les acteurs du continuum de sécurité et de justice (police nationale et municipale, gendarmerie nationale, corps préfectoral, sapeurs-pompiers, administration pénitentiaire, magistrature, élus locaux…). Il est composé de l’Association des hauts fonctionnaires de la police nationale (AHFPN), l’École nationale supérieure de la police (ENSP), l’association Femmes de l’Intérieur, le fonds de dotation du Centre des hautes études du ministère de l’Intérieur (AMICHEMI), l’Amicale des cadres de la police nationale et de la sécurité intérieure (ACPNSI), l’Association des anciens combattants et résistants du ministère de l’Intérieur (AACRMI). Ils ont été rejoints en 2023 par Orphéopolis, l’association Flag!, l’École nationale d’administration pénitentiaire (ENAP) ainsi que par l’Association nationale des directeurs de services départementaux d’incendie et de secours (ANDSIS) en 2024 et l’Académie de Police.